Stratégie supply

Le succès de Spartoo fondé sur l’excellence logistique

Par Guillaume Trecan | Le | Retail

Le spécialiste de la vente en ligne de chaussures, Spartoo a développé une très forte expertise logistique, au point de créer une filiale dédiée aux expéditions des e-commerçants. Les piliers de l’efficacité de sa logistique : une plateforme sur quatre niveaux, des étiquettes RFID sur chaque produit et une politique de fidélisation de ses salariés dont plus de 70 % sont des CDI.

L’entrepôt de Spartoo à Saint-Quentin Fallavier dispose d’une mezzanine sur trois niveaux. - © Guillaume Murat
L’entrepôt de Spartoo à Saint-Quentin Fallavier dispose d’une mezzanine sur trois niveaux. - © Guillaume Murat

Spartoo transporte environ deux millions et demi de colis par an, auxquels s’ajoutent près de 300 000 retours et a généré grâce à ses activités un chiffre d’affaires de 210 millions d’euros par an (en GMV, revenus de la marketplace y compris).

Un entrepôt doté d’une mezzanine sur trois niveaux

Les dirigeants de Spartoo, qui mettent en avant leur culture d’ingénieur, ont poussé très loin l’optimisation de leur supply chain. Dans son entrepôt de Saint-Quentin Fallavier, l’entreprise stocke un peu plus de 1,2 million de pièces. Les 22 000 m2 au sol de l’entrepôt de Saint-Quentin Fallavier sont ainsi optimisés au maximum, avec notamment une mezzanine sur trois niveaux qui porte la surface utilisable à près de 60 000 m2. A cela s’ajoute un fort degré d’automatisation, avec des convoyeurs et, en sortie, des chaînes pré-mécanisées pour les emballages en carton. « La question qui se pose maintenant porte sur un passage à l’emballage en matériaux écologiques », avance Paul Lorne, qui s’affirme persuadé de l’intérêt de cette évolution autant d’un point de vue efficacité opérationnelle, coût et empreinte environnementale.

A l’époque le ré-aménagement et la mécanisation de l’entrepôt ont mobilisé un investissement conséquent d’un montant de cinq millions d’euros pour Spartoo, dont près de trois millions d’euros pour la construction des mezzanines et 1,5 million d’euros de mécanisation en sortie.

1 000 colis expédiés à l’heure

En 2022, Spartoo a à nouveau fortement investi pour faire en sorte que 100 % des colis bénéficient d’une étiquette RFID permettant une traçabilité sans faille, de la réception, jusqu’à l’expédition, en passant par le rangement et la préparation, y compris les retours. Le taux d’erreur est ainsi réduit au minimum. Cet investissement a aussi permis à Spartoo de passer à une cadence de 1 000 colis à l’heure à l’expédition. Le coût d’une dizaine de centimes de ces étiquettes RFID (manutention comprise) dont environ 300 000 euros de consommables par an, par produit est donc très facilement amorti au moment de l’expédition.

Pour tirer à un maximum de profit de son excellence logistique, le distributeur e-commerce de chaussures à fondé en 2014 une filiale spécialisée dans les activités de commissionnaire de transport, TooPost, qui gère quatre millions de livraison par an pour 150 e-commerçants dont 120 pour plus de 100 000 colis par an.

Créée initialement comme relai de croissance 2014, huit ans après la création de Spartoo, cette activité est celle qui connaît aujourd’hui les plus forts développements. « Nous avions alors fait une revue stratégique de nos points forts, assez rapidement est sorti le transport. Dans une activité comme la nôtre, qui propose des livraisons et des retours gratuits pour toute l’Europe, c’est évidemment un domaine dans lequel on doit exceller. Nous traitons en direct avec toutes les postes, sans passer par des intégrateurs et nous avons des contrats avec des transporteurs pour injecter nos colis directement chez ces partenaires locaux partout en Europe », explique. TooPost vient de s’implanter à Lille, sa quatrième ville après Lyon, Marseille et Toulouse.

Paul Lorne, co-fondateur de Spartoo. - © D.R.
Paul Lorne, co-fondateur de Spartoo. - © D.R.

Notre décision d’internaliser notre logistique ou encore notre service client, contribue à notre rentabilité

Après avoir connu le boom du e-commerce lors du Covid avec une croissance de 20 % à 25 %, Spartoo a vécu l’atterrissage brutal du retour à la normale et retrouve maintenant les volumes qui étaient les siens un an ou deux ans avant le confinement. Pourtant son fondateur estime l’entreprise à même d’assumer ses variations, en particulier du fait de sa nature très intégrée. « Nous avons fait le choix il y a dix ans d’être une entreprise rentable. Nous avions alors cinq ans d’existence et s’arrêter de croître à ce stade de startup n’est pas courant. Mais nous nous réjouissons de ce choix. De même, de notre décision d’internaliser notre logistique ou encore notre service client, contribue à notre rentabilité. »

Un levier RH et organisationnel

Mais maintenant que des leviers majeurs de productivité ont été mis en place, les équipes logistiques de Spartoo doivent maintenant s’attaquer à des leviers d’efficacité plus complexe, en particulier pour fidéliser ses opérateurs sur l’entrepôt. « Nous sommes sur un marché en plein emploi », confie Thibaud Lazuech, directeur du site logistique de Saint-Quentin Fallavier.

Nous visons 70 % à 80 % de CDI dans nos équipes logistiques

Spartoo est ainsi passé d’horaires en 2X8 avec équipes de nuit à des horaires de journées, voire à des horaires libres pour les équipes qui gèrent les retours et peuvent effectuer leurs sept heures de travail en commençant à l’heure de leur choix. « Cela nous a permis de retenir des profils que nous n’aurions jamais attirés et des personnes globalement plus investies qui s’inscrivent dans la durée parce que leur travail correspond à leur besoin en termes d’équilibre entre vie pro et vie perso », remarque Thibaud Lazuech, qui poursuit : « Nous visons 70 % à 80 % de CDI dans nos équipes logistiques parce qu’étant donné les tensions sur les recrutements dans notre bassin d’emploi, on peut facilement se retrouver sans ressources intérimaires. »

Dans le cadre de ses efforts en matière de QVT, Spartoo propose également les services d’un coiffeur sur place tous les jeudis et d’une esthéticienne tous les vendredis. Des services appréciés notamment par les 75 % de femmes qui composent les équipes. Tous les collaborateurs bénéficient en outre d’un entretien bimensuel avec son management.

« Au niveau de la logistique, nous commençons à travailler sur la connaissance du savoir-faire des opérateurs pour aider les chefs d’équipe à mieux les positionner sur des zones de forte connaissance. La data et l’IA peuvent nous aider à mieux organiser nos opérations. Le geste métier ne change pas, mais c’est sur les temps improductifs que nous avons un potentiel de gain de productivité », explique Paul Lorne.