Sodis (Gallimard) : « Dans l’édition, nous avons des enjeux économiques et des enjeux de service »
Dimitri Wlodarczyk est le nouveau directeur des opérations de Sodis, une des deux filiales de distribution du groupe Madrigall (Gallimard et Flammarion). Dans sa feuille de route : l’optimisation des process.

Propos recueillis par Stéphanie Gallo Triouleyre
Vous êtes le nouveau directeur des opérations de Sodis, la filiale historique des éditions Gallimard groupe Madrigall, troisième acteur français du secteur. Comment est organisée la logistique du groupe ?
Madrigall s’appuie sur deux entités de distribution. La première est donc Sodis, effectivement société de distribution historique de la maison Gallimard. La seconde est Union Distribution, qui, elle, est la société historique de distribution de Flammarion, que le groupe avait racheté il y a un peu plus d’une dizaine d’années. À elles deux, à parts à peu près égales, elles gèrent la distribution de l’ensemble des productions éditoriales de Gallimard et de Flammarion mais aussi d’un certain nombre d’autres maisons d’édition qui souhaitent nous confier la diffusion et donc la distribution de leurs ouvrages. Au total, nous avons un peu plus de 200 000 références, et plus de 80 millions de volumes préparés chaque année.
J’ai donc un homologue au sein d’Union Distribution qui s’appelle Marc Genest. Nous évoluons eu sein du comité de direction de la branche distribution du groupe, pilotée par Dominique Wettstein, directeur général de Gallimard Distribution.
Les taux de retour sont substantiels, aux alentours de 20 % à 25 %
Quelle est l’organisation de Sodis aujourd’hui ?
Nous disposons de deux plateformes. La première est située à Lagny-sur-Marne, sur lequel nous assurons deux missions logistiques : la fourniture du réassort (70 % des volumes) et la gestion des retours des invendus de nos clients. Les taux de retour sont substantiels, aux alentours de 20 % à 25 %. Notre deuxième site est à Cregy-les-Meaux. Il gère, lui, les activités de nouveautés. Chaque semaine, des colis avec les nouveautés éditoriales sont expédiées à nos libraires afin qu’ils puissent les mettre en rayon facilement. Par ailleurs, en fonction de nos débords de stockage, nous confions plusieurs dizaines de milliers de palettes à des prestataires externes.
Union distribution est organisée de manière similaire avec un site principal dans le département du Loiret qui fait aussi les nouveautés sur le même site, auquel s’ajoute le soutien de sites prestataires.
Le prix du livre est très encadré. Or, la distribution est une des composantes du prix de revient d’un livre
Quels sont les enjeux auxquels doit faire face ce secteur de l’édition et comment Sodis participe à la performance globale du groupe face à ces défis ?
Selon moi, il y a quatre types d’enjeux. D’abord, des enjeux économiques : le prix du livre est très encadré. Or, la distribution est une des composantes du prix de revient d’un livre. Il faut donc optimiser très finement nos process et notre organisation, sachant que nous sommes positionnés sur un marché mature : nous ne bénéficions donc pas d’effet volume qui viendrait écraser les prix. Cette compétitivité économique doit être assurée tout en maintenant, voire en améliorant encore, notre qualité de service.
Car justement, l’enjeu du service est très fort dans un environnement où Amazon - qui est par ailleurs aussi notre client - a imposé un standard à J+1 sur le e-commerce. Nous devons être capables de proposer des solutions opérationnelles pour permettre à nos clients libraires et de la grande distribution d’avoir des réponses de bon niveau face à cette concurrence du e-commerce.
Par exemple, nous avons eu le Goncourt cette année. Il a fallu se mettre en position de pouvoir imprimer, avec un bandeau spécifique Goncourt, puis de livrer en quelques heures/quelques jours au plus plusieurs dizaines de milliers d’ouvrages aux librairies. Concrètement, l’annonce du Prix a été faite le lundi midi, les équipes ont reçu en fin d’après-midi les premiers ouvrages, et nous avons pu les réexpédier dès le lendemain matin. Le mercredi matin, toutes les librairies parisiennes avaient leur livre logoté, ce qui est une très belle performance.
Et puis, nous devons aussi répondre à des enjeux sociaux, avec des questions de port de charges lourdes dans nos entrepôts et à des enjeux environnementaux.
Quelques grandes lignes de votre feuille de route ? Quelles sont vos priorités ? Des investissements, des changements à venir ?
Nous devrons nous doter des bons outils qui permettront d’être au rendez-vous des impératifs économiques de la distribution et des impératifs de service dont j’ai parlé précédemment. Nos entrepôts disposent déjà d’un haut niveau de mécanisation mais il est fondé sur des standards des années 2000. L’automatisation a beaucoup évolué ces dernières années, nous devons étudier quels seraient les bons outils.
Quel a été votre parcours avant d’arriver chez Sodis ?
Je suis logisticien depuis ma sortie d’école d’ingénieur. D’abord, au sein d’Easydis (groupe Casino) pour qui j’ai opéré à plusieurs postes pendant dix ans, à divers niveaux de responsabilités, en prenant part à plusieurs chantiers importants dont l’arrivée en logistique de Cdiscount. Puis, j’ai travaillé pendant cinq ans pour Auchan en tant que directeur d’exploitation régional. Là, le chantier principal a été de remettre à niveau la logistique Super, dans l’optique d’une stratégie mutualisée hypermarchés/supermarchés. J’ai ensuite souhaité occuper des fonctions plus stratégiques, dans des ETI, en étant plus proches de la gouvernance. J’ai rejoint le groupe Flauraud (automobile) comme directeur logistique puis chez SCC (informatique).
Ce secteur de l’édition est très challengé
Et donc, en septembre dernier, vous avez rejoint Sodis, dans un secteur complètement différent donc… Pourquoi ce changement de pied ?
Le monde du livre répond à des codes prestigieux, nous sommes dans le milieu de l’édition, nous côtoyons des beaux livres, presque des œuvres d’art en termes de produits. Je trouvais extrêmement intéressant de découvrir l’organisation propre à ce secteur, d’explorer ce nouvel univers. J’estime qu’il est extrêmement valorisant de contribuer au maintien d’une certaine forme de connaissance, de partage autour d’un support, beaucoup moins consumériste que la grande distribution même si nous obéissons évidemment à des obligations de rentabilité. Ce secteur de l’édition est très challengé. J’avais envie d’apporter ma vision, de contribuer avec mon expérience et à mon échelle à la transformation de ce secteur.