Pepsico : « Nous avons renforcé la flexibilité de notre supply chain au niveau européen »
Laurent Kamiel, directeur supply chain France de Pepsico revient sur la refonte du schéma logistique européen du groupe. Entreprise il y a deux ans, elle est désormais opérationnelle. Il sera grand témoin de l’atelier débat « schéma : Redéfinir le design de sa supply chain pour gagner en efficacité » le 4 mars lors des Supply Days, à Deauville.

Où en est le projet de redéfinition du schéma logistique de Pepsico en Europe ?
Après deux ans, nous avons fini de déployer un important projet de refonte de notre schéma logistique et de nos points de sourcing de nos produits snacks et chips. Alors que nous les sourcions auparavant auprès d’une usine en Belgique et, ponctuellement, en Espagne, nous avons décidé de faire fonctionner en miroir ces deux usines pour 95 % de nos produits. L’Espagne livre le Sud de la France et la Belgique le Nord, nous en avons profité pour augmenter l’envoi direct de nos produits à nos clients, en faisant l’économie d’entrepôts logistique intermédiaires, notamment dans le Sud.
Notre nouvelle organisation a permis de réduire, à la fois, les kilomètres parcourus, l’empreinte carbone et nos coûts
Quels bénéfices tirez-vous de cette nouvelle organisation ?
Notre nouvelle organisation a permis de réduire, à la fois, les kilomètres parcourus, l’empreinte carbone et nos coûts. Nos paquets de chips parcourent ainsi en moyenne 200 kilomètres de moins qu’auparavant. Sur les deux dernières années, nous avons enregistré une réduction de coût d’environ 8 millions d’euros, ce qui nous a permis de compenser l’inflation.
Si l’on regarde un peu plus en détail, qu’avez-vous dû changer dans votre organisation, vos outils et vos relations avec vos prestataires pour obtenir ce résultat ?
Ce nouveau schéma a induit énormément de changements dans notre supply chain, à commencer par un alignement de nos outils informatiques pour que des expéditions d’Espagne puissent générer des factures dans la BU Pepsico France. Ce nouveau schéma logistique implique une nouvelle répartition des rôles et des responsabilités. Une partie des stocks qui étaient auparavant gérés en France sont maintenant gérés en Espagne à la sortie d’usine.
Nous avons aussi dû revoir toutes nos routes de distribution avec nos transporteurs, tout en maintenant des objectifs de décarbonation. Au lieu de partir d’un entrepôt du Nord de la France, nous partons désormais directement d’Espagne. Nous avons développé le rail-route et les biocarburants depuis l’Espagne. Un projet qui comporte néanmoins des défis : en Espagne, les stations de recharge en bio fuel sont moins fréquentes qu’en France et l’écartement des rails varie également d’un pays à l’autre.
Ce nouveau schéma a nécessité un travail de qualification des formules et des produits dans les deux usines
Cela a aussi impacté nos clients, surtout ceux dont nous gérons les commandes en VMI. Nous livrons encore une partie de nos snacks depuis la Belgique et, contrairement à nos chips, ces produits passent par notre entrepôt du Nord de la France pour redescendre dans le Sud. Chaque client en snacks est désormais livré depuis deux points. Nous avons découplé les commandes de nos clients et adapté notre fréquence de production, de livraison, de rythme d’approvisionnement, de stock cible chez eux, etc.
Enfin, ce nouveau schéma a nécessité un travail de qualification des formules et des produits dans les deux usines. Désormais, lorsqu’un changement intervient sur nos produits, nous gérons deux changements pour que tout soit coordonné entre deux usines.
Comment avez-vous abordé le chantier d’alignement des systèmes d’information que vous avez mené en parallèle ?
La France et la Belgique étant sous SAP et l’Espagne encore sous Oracle, nous avons lancé une série d’interfaces pour que l’usine espagnole soit capable de gérer nos stocks et connaitre nos références françaises. Également lorsque nous générons des avis d’expédition depuis cette usine, cela s’intègre automatiquement dans nos systèmes afin que nous puissions générer une facture vers le client final.
Nous avons créé un modèle variable qui peut s’ajuster quasiment en temps réel
Ce projet a-t-il également eu des conséquences au niveau gestion des équipes ?
Ce changement nous a permis de lisser nos capacités. Nous avons fiabilisé et pérennisé des volumes pour l’Espagne et nous avons désaturé l’usine en Belgique. Avec ce nouveau schéma nous avons renforcé la flexibilité de notre supply chain au niveau européen. Nous avons créé un modèle variable qui peut s’ajuster quasiment en temps réel. En fonction des variations saisonnières ou d’événements qui peuvent modifier la production d’une usine ou de l’autre, nous pouvons basculer les approvisionnements du Nord au Sud.
La redéfinition d’un schéma logistique est-elle un exercice incontournable à répéter régulièrement ?
Il est sain et primordial de prendre en compte les évolutions du marché de nos clients et les nouvelles capacités qui apparaissent de loin en loin. Ce que nous voulons c’est construire des réseaux logistiques flexibles. De par l’agilité qu’elle nous a permis d’acquérir, cette refonte de notre schéma logistique s’est avérée extrêmement positive, au point que nous envisageons de la reproduire pour nos boissons. Toutes nos usines ne sont pas capables de produire tous types de produits, ce qui implique beaucoup de transferts de marchandises inter-usines pour livrer nos clients finaux. Nous avons donc à cœur de simplifier au maximum ces flux et de regrouper les capacités de production dans des usines importantes pour livrer directement l’ensemble de nos clients.
Nous travaillons actuellement sur cet aspect régionalisation pour étudier comment nous pourrions développer certaines capacités de production dans nos usines, en France, en Espagne ou en Allemagne, pour produire et livrer au plus près des clients.