Solutions et techno

Camaïeu resserre le lien avec ses fournisseurs pour fiabiliser sa supply chain

Par Guillaume Trecan | Le | It

Poussée par la dégradation du transport de fret international et des besoins de réactivité non satisfaits, la direction supply chain de Camaïeu s’efforce de gagner en visibilité sur ses importations en s’appuyant sur la plateforme collaborative Windle. Elle va aussi revoir l’équilibre de son sourcing, la zone Europe Maghreb passant de 10 % à 40 % du total.

Camaïeu resserre le lien avec ses fournisseurs pour fiabiliser sa supply chain
Camaïeu resserre le lien avec ses fournisseurs pour fiabiliser sa supply chain

Les délais d’acheminement des pièces de mode commandées par Camaïeu à ses fournisseurs sont passés de 30 à 40 jours avant la crise à 45 à 60 jours actuellement. Cette augmentation des délais a des conséquences graves pour la supply chain et n’est pas sans conséquence sur les ventes. Ces différentes pièces, commandées près d’un an à l’avance, doivent en effet arriver toutes ensemble dans chacun 512 magasins de la marque en France afin d’être agencées en des tenues harmonieuses et attrayantes. « Si nous n’apprenons qu’au dernier moment qu’un produit attendu à une date précise manquera, cela nécessite de repenser tout ou partie de la présentation des produits en magasin. Ce qui peut impacter significativement les ventes », déplore le directeur supply chain de la marque, Frédéric Deconinck.

Frédéric Deconinck, directeur de la supply chain. - © D.R.
Frédéric Deconinck, directeur de la supply chain. - © D.R.

                                                                             

Les compagnies maritimes sont toutes puissantes et décident unilatéralement ce qu’elles font de nos marchandises 

Frédérick Deconinck, ne voit pas d’issue proche à l’explosion des tarifs et à la dégradation de la qualité du service du fret maritime. « Les compagnies maritimes sont toutes puissantes et décident unilatéralement ce qu’elles font de nos marchandises », constate-t-il, tout en notant que cette situation se dégrade depuis 18 mois, sans espoir à court terme. « Nous n’avons pas de perspective de retour à une situation, non pas normale, mais déjà un peu plus équilibrée, avant au moins le deuxième semestre 2022 », se projette-t-il.

 

Une communication entre tous les acteurs de la chaine d’approvisionnement

Pour atténuer ce risque, il s’appuie sur la plateforme collaborative Windle qui permet d’échanger des informations entre tous les acteurs du flux : fournisseurs, transitaires, transporteurs et gestionnaires achats. « Quand nous concevons les collections et que nous passons les commandes, un cadencement de production est prévu avec chacun des fournisseurs. Il est rentré dans l’outil et va permettre d’envoyer des messages à tous les interlocuteurs de la chaine, afin de vérifier, à chaque étape, que les délais initialement prévus seront tenus », explique Frédéric Deconinck.

Mais pour fiabiliser sa supply chain, Camaïeu a fait le choix plus radical de revoir son sourcing au profit de fournisseurs plus proches de ses marchés. A ce jour 90 % de ses achats sont réalisés en Asie (Chine, Bangladesh, Inde et Pakistan) et 10 % Europe et Maghreb. A terme ce ratio doit passer à 60 % Asie et 40 % Europe Maghreb. Chaque année, la marque achète pour 150 millions d’euros de produits finis. « Dans le retail, l’agilité et la réactivité par rapport à l’évolution des besoins des consommateurs sont déterminantes. Etant sur des zones de sourcing très éloignées, nous avions perdu cette réactivité », analyse le directeur supply chain.

Afin de rester en accord avec les attentes clients en matière de prix, l’entreprise devra travailler sur le mix produit et enrichir l’offre avec des produits à plus forte valeur ajoutée. La différence de prix entre le proche import et l’Asie peut en effet varier du simple au double.

Elargir le panel pour des raisons capacitaires

Les fournisseurs de proximité risquent également de rencontrer des difficultés à satisfaire des commandes en centaines de milliers de pièces, comme celles qu’acceptent régulièrement les fournisseurs asiatiques pour Camaïeu. « Cela nous oblige à nous réorienter sur un nombre de fournisseurs plus importants », analyse Frédéric Deconinck.

Dans cette stratégie, Camaïeu devra aussi faire avec la hausse des prix des matières premières, comme par exemple le coton, dont les prix ont doublé ces douze derniers mois. A l’inverse, l’entreprise pourra compter sur une réduction de ses frais de transport et la disparition de certains frais de douane.

S’il trouve ainsi des moyens d’atténuer les désagréments opérationnels de la crise du transport international, le directeur supply chain de Camaïeu poursuit également l’objectif à plus long terme d’améliorer l’empreinte carbone du groupe, ce que le rapprochement à proximité de la France d’une partie de son sourcing va lui permettre de faire. Pour répondre aux attentes RSE des consommateurs, la marque s’apprête d’ailleurs à mettre en place, avec la startup Glimpact et la société de conseil Cose361, un étiquetage qualifiant le niveau écologique de leurs produits. L’impact du transport influera sur cette notation, mais « le plus important reste quand même la production elle-même », reconnait Frédéric Deconinck.

Il y a forcément des optimisations à faire et de la mutualisation, en travaillant les synergies entre les différentes marques 

Pour optimiser la supply chain de l’entreprise, la recherche de synergies avec les autres enseignes du groupe HPB (Hermione People & Brands) en août 2021 qui a racheté Camaïeu, de même que Go Sports, GAP, ou encore la Grande Récré, est aussi une piste sérieuse. « Nous sommes plusieurs entreprises à acheter des produits dans des zones de sourcing identiques. Même si nos produits ne sont pas les mêmes, tous sont acheminés depuis ces mêmes zones, stockés puis distribués dans l’ensemble du réseau de magasins. Il y a forcément des optimisations à faire et de la mutualisation, en travaillant les synergies entre les différentes marques », avance le directeur supply chain de Camaïeu.